28 décembre 2007

Petits et grands (titre temporaire) - Première partie

La nuit était tombée depuis plusieurs heures sur la merveilleuse cité de Gesserit. Les rues propres qu'une légère brume recouvrait luisaient aux multiples feux des lampadaires qui diffusaient une lumière bleutée, un peu floutée par l'humidité de la nuit. Les travailleurs nocturnes oeuvraient le plus silencieusement possible, sans déranger les autres habitants. Nettoyeurs, médecins de garde, cerbères d'édifices importants... tous effectuaient leur métier sans heurt, avec force d'habitude et la satisfaction d'un travail bien fait. La sérénité enveloppait toute la cité d'un duvet confortable et léger. Les hautes maisons claires abritaient chaudement leurs habitants qui dormaient dans la douceur de leurs murs de pierre. Les nombreuses bibliothèques, recelant de riches connaissances accessibles à tous, brillaient, malgré l'heure avancée de la nuit, de toute leur majesté architecturale et des rares lampes à huile encore utilisées par des érudits noctambules. Même les Quatre Tours, que l'on pouvait apercevoir au loin et qui étaient continuellement le siège d'une activité frénétique, même les plus hauts dignitaires de la cité qui vivaient dans ces prestigieux bâtiments, goutaient les délices d'une douce langueur.

Les quadruples Tours d'Elentil. Quatre flèches d'or, effilées, lisses comme des miroirs et enveloppées d'une aura jaune et blanche, dont les pointes montaient si haut dans les cieux qu'elles servaient à communiquer avec les Dieux. À mi-chemin entre ciel et terre, le corps poli de chaque tour avait été enchâssé dans un immense disque, également doré et suffisamment grand pour que chacun de ces plateaux touchât ses voisins, formant ainsi une plate-forme dont le motif ressemblait à un trèfle sans tige, sur laquelle les dirigeants, les prêtres, les messagers ainsi que de nombreuses autres créatures travaillaient, s'affairant à des tâches complexes.
L'altitude impressionnante de la surface formée par les quatre disques, ainsi que celle des Tours elles-mêmes, permettait d'embrasser du regard les différents éléments du paysage dans lesquels la cité se lovait, puisait sa force, prospérait. Au Nord se trouvaient les mines perpétuelles de Fed, sources infinies d'énergie puisée par des procédés mécaniques simples et propres. Entre les Tours et les habitations, le prestigieux amphithéâtre des Sables d'Otrum, où jamais les plus grandes symphonies ne furent jouées de façon aussi émouvante, et le musée des Arts Divianta, qui regorgeait de peintures, de sculptures, de tapisseries, de fresques aux couleurs quasi-surnaturelles, offraient un divertissement des sens permanent.

Tout autour, le paysage désert et rocailleux était bien sombre et triste en comparaison. L'on pouvait apercevoir les routes zigzaguant parmi les cailloux et maigres arbustes qui ponctuaient la plaine, certaines utilisées régulièrement pour accéder aux différentes ressources plus ou moins cachées, aux lieux plus ou moins bien famés, aux contrées plus ou moins belliqueuses. Les passages fréquentés ne représentaient cependant qu'une infime partie de l'infrastructure routière de la Cité. Les chemins tracés mais inusités se comptaient par milliers et se perdaient dans les confins de la vaste étendue sans vie, menant nulle part en particulier, mais présents au cas où le besoin s'en ferait ressentir. Rares étaient les constructions qui venaient rompre la monotonie du paysage. Aucun relief ne troublait l'horizon désespérément vide et morne. Le désert étendait sa griffe sèche et cruelle autour de Gesserit partout où le regard pouvait se poser.

Un poste de garde sur une route isolée. Une grande créature ailée et sombre faisait les cents pas près d'un puits de pierre posé sur le bord du chemin. La nuit était belle et calme. Le vent apportait une odeur de poussière et de chaleur estivale, comme toutes les autres nuits depuis des lustres. Les yeux rouges et perçants de la créature scrutaient l'obscurité, à la recherche d'éventuels rôdeurs, mais seule une immobilité pesante régnait, comme à l'accoutumée. Le crissement des griffes sur le sol à chaque pas de l'imposant garde se perdaient dans le silence clair. Afin de tromper le manque d'action, il prit un caillou dans sa paume d'écaille, tenta maladroitement d'y graver quelque dessin et, devant la médiocrité du résultat, le broya entre ses doigts griffus. Si les Gardes de Feu de la Cité étaient suffisamment puissants pour empêcher quiconque, insecte égaré ou légions de mercenaires, de franchir leur poste, leur relatif manque d'intelligence et d'initiative faisait qu'ils ne s'ennuyaient pas tant que ça durant leur travail. Leur principal souci était de ne pas s'engourdir tout en surveillant étroitement la route qui leur avait été attribuée. D'un puissant battement de ses ailes de dragon, le garde prit son envol silencieusement, voulant profiter d'un vent ayant forci depuis quelques instants.

À peine eut-il le temps de commencer une série de mouvements aériens que ces yeux flamboyants captèrent au loin une colonie de lumière pareille à un essaim de lucioles. Elles avançaient lentement vers le poste de garde, mais régulièrement, avec de légers mouvements de cahots dûs à l'état médiocre du pavement. Des véhicules. De son point de vue, le garde pouvait compter une petite cinquantaine de lanternes. Soucieux de ne pas laisser son morceau de frontière sans surveillance, il n'alla pas à leur rencontre pour les formalités d'usage et les attendit parmi les chauds courants aériens de la nuit. Un grondement sourd commença à se faire entendre, puis enfla au fur et à mesure que les inconnus approchaient. De gros engins à en juger par le timbre grave des roues sur le sol. De mémoire de Garde de Feu, rien de plus gros qu'un humain muni d'un gros sac à dos n'avait franchi cette zone. Et encore, on chuchotait qu'il s'agissait en fait d'une inspection de routine.
À l'approche des véhicules, le garde se laissa tomber au sol comme un roc, ses jambes musclées accusant le choc sans broncher et les griffes de ses pieds creusant de gros trous dans le sol. Il déploya grand ses ailes afin de clairement signaler la défense d'entrer et attendit. Ceux voulant s'infiltrer dans la Cité étant généralement extrêmement petits, discrets et passe-partout, la méfiance du garde était quelque peu amoindrie, masquée par une curiosité d'autant plus excitée que cette route n'avait pas accueilli de voyageur depuis longtemps.
Le véhicule de tête stoppa à quelques mètres devant le garde et les suspensions mirent une poignée de secondes à le stabiliser parfaitement. Il s'agissait d'une sorte de grand carrosse, plus haut qu'une maison, entièrement construit avec des planches de bois mal ajustées et assemblées à la va-vite. L'essieu arrière supportait tout le poids du chargement et avait l'air de ne résister que par miracle ou un enchantement particulièrement efficace. Le conducteur, assis à l'avant, sauta de son siège et s'avança vers le garde :

- Salut!
- Identification? jappa le garde.
- Cinq huit zéro zéro huit six, répondit le conducteur sans se formaliser à propos ton aride du gardien.
- Destination?
- Cité de Gesserit.
- Provenance?
- Cité de Delphes.
- Combien de véhicules?
- Vingt-et-un, mais d'autres devraient arriver plus tard.
- Je verrai cela avec celui qui les conduira, rétorqua la créature massive. Qu'est-ce que vous transportez?
- Des habitants... spéciaux de Delphes.
- Comment ça "spéciaux"? gronda-t-il. De quelle classe d'habitants s'agit-il?
- Désolé mon vieux, mais je sais parfaitement que ce ne sont pas tes affaires, rétorqua sèchement le conducteur nullement impressionné. Tu le sais aussi d'ailleurs.
- Hmph... Bon, dis à tes zigotos de descendre et de passer. Dans quel secteur vous devez vous rendre?
- Le quartier résidentiel. Ils ont besoin d'un nouveau foyer.
- Alors c'est par là. Mais ne faites pas les malins, si jamais vous sortez de la route...
- Tu crois qu'ils ont fait tout ce chemin pour terminer dans les nimbes? Évidemment qu'ils fileront droit. Et puis ils sont attendus, alors laisse-les passer qu'on en finisse. J'ai peur que les chariots de transports ne tiennent plus longtemps le coup avec un tel chargement.

Sans trop maugréer - après tout, son boulot ne consistait ni à poser des questions indiscrètes, ni faire reluire son ego à grand renfort d'intimidation inutile - le garde s'effaça pour laisser la place à la "cargaison". Sitôt qu'il eut rejoint le bord du chemin, un voile de lumière violette et sombre apparut en travers de la route à l'endroit où il s'était retiré. Le conducteur du convoi parut satisfait et retourna à son véhicule. Il actionna une manette et, sans pour autant avoir l'air d'être reliées par un mécanisme quelconque, les soutes de toutes les carrioles s'ouvrirent simultanément avec un soufflement d'air s'échappant d'un circuit pneumatique et une plainte métallique lâchée par des engrenages grincheux. Les voyageurs descendirent un par un sans bousculade, très ordonnés et disciplinés, le tout dans un silence de crypte.

Chacun d'eux était habillé de longues robes noires et très amples, si bien qu'il était impossible de deviner la morphologie des individus. Ils paraissaient avoir tous la même taille, mais le noir, trop intense pour être naturel, et l'obscurité ambiante laissaient planer un doute sur un tel jugement. Leur démarche était automatique, non pas rigide comme aurait pu l'être celle d'un robot, mais plutôt involontaire comme celle d'un zombie. Impossible de lire la moindre émotion ou lueur d'intelligence dans leurs yeux : ceux-ci, à l'instar leur tête, étaient masqués par une grande capuche, noire également.

Centaines d'ombres mouvantes à la lueur pâle des feux des véhicules, les réfugiés de Delphes marchèrent vers la fine barrière luisante dressée en travers de la route par le gardien. Ce dernier était intrigué par de tels visiteurs, mais ne chercha pas à en arrêter un pour le questionner ou à interroger plus profondément le conducteur. Il n'en avait pas le droit. Il n'était pas là pour être curieux.

Il ne restait plus qu'un seul des vingt-et-un convois à débarquer, les vingt premiers étaient déjà repartis au loin. Les passagers du dernier véhicule formaient une file mouvante entre l'écran violet et la soute, laquelle se vidait lentement. À peine les premiers réfugiés eurent-ils le temps de franchir les frontières de la cité que le passage lumineux disparut et avec lui, toutes les autres robes noires, ainsi que le convoi lui-même. Ceci se déroula sans un bruit, sans un cri, sans un frisson. Le gardien eut juste le temps de les voir s'évanouir dans le néant comme des grains de sel dissous dans l'eau. Surpris sans s'émouvoir, il reprit son poste en jetant un dernier coup d'oeil aux survivants qui, nullement atteints par la perte de leurs semblables, cheminaient vers le quartier résidentiel de la cité. Les mages des Tours d'Elentil sauront pourquoi ils sont là.

La garde avait encore à l'esprit la récente péripétie quand il entendit un léger bruit. Ses sens, d'avantage aux aguets depuis l'inopinée déchirure du passage lumineux qu'il avait ouvert, cherchaient à en déceler la nature. Roulements de petits cailloux dérangés par des mouvements rapides, odeur de fourrure poussiéreuse, rapidité d'approche furtive dénotant une taille réduite... Tentative d'intrusion. Le gardien déploya ses grandes ailes écailleuses couleur de désert, bloquant tout accès. La fréquence des petits pas sur le sol, d'abord élevée, diminua progressivement au fur et à mesure que leur auteur s'approchait du dragon, pour finir par s'arrêter complètement. Rien ne pouvait tromper la vigilance du gardien, rien ne pouvait passer sans qu'il ne soit au courant.

Scrutant la nuit de ses yeux rouges et luminescents, il identifia une forme allongée et poilue, aplatie au sol, se lovant autour d'une pierre, immobile pour essayer de se fondre dans le décor. Mais les artifices pouvant berner un gardien de la cité sont rares. Il s'empara de l'intrus, qui était en l'occurrence un furet, par la peau du cou et l'approcha de son visage.
- D'où viens-tu toi?
Le furet ne répondit pas, ce qui eut pour effet de modifier la façon dont celui qui avait emprise sur lui le dévisageait. Les habituelles pupilles de braise avaient laissé place à un regard pourpre posé et inquisiteur. Il fixait celui du furet avec la même intensité que s'il tentait de déchiffrer à l'oeil nu un lointain parchemin.
Delphes.
- Delphes? Décidément... Et qu'est-ce que tu viens faire ici?
On m'a envoyé pour vérifier si l'arrivée du dernier... heu... convoi s'est bien déroulée.
- Hmm... Code d'identification?
Ce qu'il obtint comme réponse ne parût pas lui plaire. Son regard reprit sa teinte vermeille et lançait des éclairs de haine. Sans mot dire, il jeta le petit animal au loin, hors des limites de la route qui serpentait sur le sol frais du désert. Aussitôt que la trajectoire de l'indésiré furet eut intersecté avec le bord de la route, il disparut corps et âme, aussi discrètement que la chute d'un grain de sable... pareillement aux infortunés réfugiés de Delphes qui n'avaient pas pu franchir à temps l'entrée du territoire de Gesserit.

L'inopportune bestiole éliminée, le gardien, soucieux, s'approcha du puits en pierre posé sur le bord du chemin. En fait de puits, il s'agissait plutôt d'un bas muret de grès encerclant un insondable trou dans le sol d'environ un mètre de diamètre. Sur le rebord plat et large d'une paume était posée une multitude de petits osselets, de diverses couleurs, de diverses formes. Le gardien en saisit un rond et jaune, similaire à une pièce d'or mate et immédiatement, un objet identique apparût au même endroit pour le remplacer. Nonchalamment, il lança la piécette dans le puits, lequel régurgita rapidement après une petite sphère d'un beige très clair, comme un oeuf parfaitement rond. De nettes et simples lettres inscrites sur la face de la sphère épelaient le mot "Gesserit". L'oeuf flotta vers la gardien, qui ne prononça qu'un seul mot : "Delphes". Aussitôt, la boule prit la direction de l'horizon, zigzaguant au gré des méandres du chemin, fendant l'air aussi rapidement qu'un éclair. Elle disparût très vite du champ de vision du gardien, pourtant très développé, tandis que ce dernier reprenait sa place. Les Balles mettent généralement très peu de temps pour revenir. Leur simplicité et leur taille leur permettent de franchir les distances en un clin d'oeil.

Une heure passa, suivie par une deuxième. Le gardien avait envoyé trois autres Balles vers Delphes, au cas où les routes furent encombrées ou particulièrement mal famées. Mais aucune ne revint. Il retourna alors au puits et y jeta une fine baguette cuivrée. Un visage difforme s'y dessina alors, cornu, enveloppé d'une aura d'un vert malsain teinté de jaune. Les yeux blancs de cette chose se tournèrent vers le gardien et, en l'apercevant, celle-ci dévoila une rangée de crocs acérés parmi lesquels pourrissaient les restants de quelque innommable repas. De mauvaise humeur, assurément.

- Quoi? aboya le démon d'une voix qui aurait pu faire saigner un coeur de pierre.
- Maitre, Delphes a été détruite.

04 décembre 2007

Fri di bi de hu!

J'aurais clairement du insister pour faire mon stage dans un pays scandinave. Ces quelques 52h en pays viking ont presque été aussi géniales que mes 7 mois en Irlande…

Bon, j'aurais bien entretenu le suspens si la conclusion en valait la peine, mais comme ce n'est pas le cas, j'informe immédiatement que je n'ai malheureusement pas eu la joie et l'honneur d'œuvrer à la communion entre la France et le Danemark… Affreux concours de circonstances, mais je n'ai pas grand-chose à me reprocher.

Nous arrivons donc Mad et moi à 21h à l'aéroport de Copenhague. En fait de froid sec et pinçant comme on pourrait s'y attendre dans une capitale aussi haute en latitude, on débarque sous une température fraiche mais supportable et une bruine pas forcément très agréable.

Après les hésitations habituelles de ceux qui débarquent dans un pays où ils ne comprennent pas la langue (et encore pouvons-nous nous estimer heureux, les Danois parlent très bien anglais), nous chopons le métro copenhagois, lequel est propre, tout neuf et automatique. Nous descendons à ce qui nous parait être la station de notre hôtel (avec leurs noms et leurs lettres bizarroïdes, on a quand même le doute), la crainte au ventre de galérer moultes dizaines de minutes pour le trouver, et ô joie ! En descendant du train (le métro est à l'extérieur pour le coup), on voit un beau grand panneau « Park Inn ».

On s'y rend donc, bien contents que les formalités d'usage se déroulent aussi bien. Hôtel assez luxueux, avec piscine, restaurant-moquette, billard et tout le tintouin. Le réceptionniste nous accueille chaleureusement et nous fournit les informations que nous lui demandons. Ô joie derechef ! le métro fonctionne toute la nuit durant le weekend ! Faudrait répéter ça à la RATP tiens…

Bref, le temps de poser nos sacs dans notre chambre et nous v'là parti pour la capitale. Après une petite poignée de minutes, nous descendons à Kongens Nytorv, sympathique et décorée place de Copenhague, d'autant plus jolie que Noël approche et que les guirlandes électriques fleurissent sur les arbres nus. Le but du jeu étant de trouver des endroits sympathiques, nous demandons conseil à une Danoise (par hasard) assise sur l'escalier du métro. Elle nous indique d'une voix de fumeuse un pub rock avec de la bonne musique, mais qui, à cette heure reculée de la nuit, est relativement vide. Le temps pour moi de goûter à une espèce de bière passable (on est loin de la Guinness) et pour Mad de siroter son éternel jus d'orange, on retourne dans la rue.
Nos pas nous mènent dans une rue piétonne bordée de magasins de fringues. Encore une fois, c'est propre, joli, agréable, pas bondé. C'est surtout à cet instant que nous est apparue la réalité de la chose : le cliché de la nana scandinave, c'est pas du pipeau ! Jamais vu une telle concentration de jolies demoiselles blondes aux yeux bleus de ma vie. Newcastle, à côté, c'était de la gnognotte. Et pourtant ! Partout des silhouettes généralement bien proportionnées (ni trop rondes, ni trop fines), de longues chevelures dont l'éventail de couleur commence au châtain pour finir au platine, des yeux azurs tous plus beaux les uns que les autres, des visages au teint clair que le froid vient rougir de-ci de-là. Rah ! Il faut chercher pour en trouver des moches !
Le temps de nous remettre de cette agression visuelle permanente, nous sommes arrivés sur une grande place qui jouxte Tivoli, un grand parc d'attraction (le plus vieux du monde encore en activité). Copenhague est une ville moderne : les publicités lumineuses sont légions sur cette place. En face de nous, deux immeubles couverts de logos éclairés de toutes les couleurs, derrière, les enseignes au néon de McDonald's et compagnie. En face à notre gauche, les lumières enchanteresses de Tivoli qui rappellent très bien que Noël approche. Bref, c'est féerique.

Faisant soif, on rentre dans un pub qui se veut écossais et dans lequel un type joue des airs irlandais (petite nostalgie de la vie dublinoise en passant). On ne s'attarde pas, l'ambiance étant calme et surtout le public dans une tranche d'âge ne satisfaisant pas nos gouts respectifs. On ne s'aventure pas très loin et on rentre dans un club, le « Renomé » (entrée gratuite, faut pas abuser non plus). Musique éclectique, grand, non-fumeur (j'ai oublié de préciser, le Danemark est un pays civilisé : les endroits publics sont non-fumeurs), sympa quoi. Après avoir fait le tour du propriétaire, nous investissons la piste de dance.

À peine nous voilà en train de dandiner nos popotins, alors que je reluquais les cibles éventuelles (ce qui globalement représentait toutes les filles présentes), que j'en repère une. Grande, blonde avec une queue de cheval, mignonne comme tout. Elle m'aperçoit également et me décoche la plus belle et plus gourmande œillade qu'une fille ait daigné m'accorder.

Un des gros problèmes que j'ai lorsqu'il s'agit d'aborder quelqu'un (les représentants du sexe opposé plus particulièrement), c'est que j'ai toujours peur de passer pour un lourd parce que je viens déranger alors qu'on m'a rien demandé.

Ici par contre, après ces coups d'yeuxet les sourires qu'elle me gratifie, je m'avance comme une fleur en zigzaguant entre les denses gens dansant pour m'approcher d'elle. Une fois à ses côtés, je lui sors je-ne-sais-plus quelle phrase assez bateau du genre « Chouette endroit ». Il n'empêche que ça permet d'embrayer sur d'où je viens, ce que je fais ici, si elle est de Copenhague, prénoms, etc. Elle nous présente, Mad et moi, à ses amis et accessoirement collègues (dont une fille dans le lot) avec qui elle dansait. Je dis bonjour, répète mon histoire à chacun, gnagnagna. Finalement je lui propose un verre, on va discuter dans un coin, ma foi tout semble farpait. On retourne sur la piste de danse, je m'approche d'elle pour nouer un contact plus physique… seulement voilà que cette bougresse me délaisse pour aller danser avec sa collègue de façon très lesbienne. Diantre ! Spectacle fort esthétique, mais qui ne fait pas mes ognons (oui, sans le 'i' : www.academie-francaise.fr/langue/orthographe/graphies.html)

Enfin je laisse passer, on retourne tous (elle, sa collègue, Mad et moi) au bar pour causer. Anecdote amusante, en causant avec l'un des types, Mad, le non-alcoolique de référence, se fait offrir une bouteille de côtes-du-Rhône, qui est encore plus mauvais que du Beaujolais nouveau. J'essaie de l'aider à faire descendre le niveau de la bouteille histoire de ne pas froisser le généreux donateur, mais le vin est vraiment dégueulasse. Anecdote qui m'a moins amusé, suite à un geste malencontreux de Laila (la divine créature que j'entreprends) percute mon verre et un peu de rouge qui tâche vient s'échouer sur son chemisier. Bordel, ça fait encore moins mes ognons ça! Petite consolation, elle s'évente le décolleté, ce qui m'offre une vue plus plongeante que je n'avais déjà sur sa poitrine. Rah, la persistance rétinienne n'est toujours pas estompée. Bon, retour sur Terre pour lui chercher de quoi s'essuyer, fin de l'incident. On cause encore un peu, vient le sujet de l'âge. Ça a l'air de l'étonner bigrement quand je lui sors le mien (d'âge), apparemment, la belle a plus de 26 ans (que je ne lui aurais certainement pas donnés). J'insiste pas plus, je crains que la différence d'âge ne joue pas en ma faveur.

Finalement, elle me délaisse pour aller causer et danser avec ses potes. Au point qu'elle ne m'accorde plus la moindre miette d'attention. Bon... Soit... Je suis venu un peu perturber leur moment à eux, ça peut se comprendre. Du coup, je me permets de me faire désirer un peu et de la laisser respirer en accompagnant Mad à un pub métalleux dont on lui a parlé peu avant. Je préviens Laila, lui précisant que je comptais bien revenir ensuite, et elle me donne son numéro pour qu'elle nous (me?) serve de guide pour Copenhague le lendemain. Fichtre, si elle a tant envie de me voir, pourquoi elle ne délaisse pas un peu ses collègues qu'elle voit tous les jours?

Enfin bref, nous revoilà partis dans les rues de la ville, toujours à admirer les belles créatures que nous croisons, pour arriver devant un bâtiment couvert d'affiches pour des groupes de musique métal, avec une file d'attente. Nous nous renseignons auprès des deux types qui sont devant nous, lesquels nous informent le prix de l'entrée et en quoi consiste le pub. En fait, la première partie de soirée c'est concert, après c'est dancefloor. Ma foi intéressant. À force de discussion, on sympathise bien, tant et si bien qu'ils nous offrent l'entrée (quand je disais que les Danois étaient super cool).

Le couloir pour rentrer, lequel donne sur les vestiaires d'abord, un escalier descendant ensuite et les chiottes enfin est étroit mais chouettement décoré. Toujours des inscriptions de et en gothique, des peintures de monstres emblèmes de groupes connus (Iron Maiden est le seul que j'ai vraiment reconnu). Je ne suis pas spécialement fan de métal, mais l'ambiance me plait.En déposant notre veste à la "garderobe" comme ils disent dans leur langue, un mec, légèrement éméché mais pas trop chiant, nous cause et finit par vouloir nous offrir une bière.

Nous descendons finalement dans l'antre de la bête ("Elle est comment la bête?"). Escalier large et un peu glissant dans les tons bleus, petit couloir qui tourne à gauche avec des alcôves pour mettre des tables et un babyfoot, et puis finalement LA salle. Un immense espace, haut d'un étage, avec au fond une scène où oeuvre un groupe du coin (je suppose). Le bar est juste sur notre gauche en rentrant, un escalier qui mène à la zone fumeur sur la droite, quelques piliers en face de nous parmi lesquels ont été disposées des tables, des petites salles rattachées à la grande tout à fait à gauche et au fond à gauche. Les musiciens débitent des décibels à tout va, mais j'apprécie.

Le mec du vestiaire va nous chercher une bière (au grand plaisir de Mad qui n'y trempera que deux fois ses lèvres), puis nous ne le revoyons plus de la soirée. Le concert se termine, petit moment de battement et un type s'installe avec une console et commence à diffuser de la musique rock, métal, un poil de techno des fois... enfin du divers, mais qui remue. On s'éclate quelque temps, mais vers 3h, je commence à fatiguer quelque peu. Je propose à Mad de revenir au « Renomé » afin de plus ou moins conclure avec Laile, mais ce petit malin était en train de se branche une nana croisée dans l'escalier. Bon, soit, chacun son business, je m'éclipse et retourne vers Tivoli.

Je re-rentre dans la boite, y retrouve avec difficulté ma cible et vais me rappeler à sa mémoire. Elle a l'air contente de me revoir, on recause un peu, mais elle me délaisse derechef très vite. Je la retrouve sur la piste, mais elle ne m'accorde que peu de regards et se concentre plus sur son pote. Bougresse va! Peut-être fais-je une erreur en n'insistant pas, mais la fatigue pesant, l'humeur devient maussade et du coup, je ne pense pas être sous mon meilleur jour en étant grognon. Je jette finalement l'éponge, sachant qu'elle m'a de toutes façons donné son numéro pour demain. Je rejoins donc l'hôtel pour faire dodo.

Lever à 9h pour profiter de Copenhague le peu de jour que le mois de décembre le permet. Il pleut. Nous descendons à une station située plus à l'Ouest de la ville afin de changer un peu et de descendre vers Tivoli par un autre chemin que celui de la veille. Un peu paumés, nous demandons notre chemin à un couple de demoiselles qui passait (chose extraordinaire, l'une d'elles est brune!) qui nous indique un chemin qui s'avèrera finalement passer par cette foutue rue piétonne centrale. Bon. Mad voulait aller à l'office du tourisme, qui se trouve justement à côté de tivoli d'après un plan de la ville. Nous faisons deux fois le tour du parc sans le trouver, alors que si nous avions levé la tête pour regarder de l'autre côté de la rue, nous aurions vu le 'i' blanc dans le carré vert si attendu. Enfin bref, on mange un peu dans un Burger King (là encore, souvenirs d'Irlande). Je n'ai pas très faim, rapport au peu de sommeil... Une foie dehors, j'appelle Laila pour convenir d'un rendez-vous. Étant donné qu'il est midi, elle me demande de la rappeler un peu plus tard, genre 14h. Bon, ok. On a du coup le temps de visiter Slotsholmen ("le château insulaire"), puis quelques docks parmi lesquels cohabitent vieux bâtiments de brique rouge et immeuble modernes, on remonte pour visiter Botanisk Have ("le jardin botanique") et Rosenborg Have ("le jardin Rosenborg"), pour finalement retrouver notre station de métro favorite en passant pas un quartier d'habitation laid. Durant tout ce temps, j'ai essayé de contacter Laila toutes les demies-heures, en vain... répondeur. Bon, du coup, vers 16h, retour à l'hôtel pour nous sécher et se reposer un peu.

On repart vers 19h pour manger un morceau dans un restaurant. Mad étant tombé amoureux du club métalleux ("The Rock" qu'il s'appelle au fait), nous y retournons. Petit oubli, la minette qu'il avait rencontrée hier s'est montrée très sensible à ses charmes chevelus, aussi est-il rentré plus tard que moi, sans toutefois l'avoir consommée. Je précise également que nos conquêtes respectives n'étaient pas disponible ce soir-là, la sienne parce qu'elle travaillait tard et qu'elle avait un autre truc de prévu depuis longtemps, la mienne parce qu'il y avait une fête à son écurie (elle fait du cheval... J'aurais pu jouer avec "Elle chevauche des bourrins", mais il faut savoir se priver de ce genre de facilités).

Bref, de retour au Rock. C'est pas que la musique me porte aux nues, mais l'ambiance était extra la veille. Ce soir, en revanche, c'est le calme plat. Le groupe finit de jouer, le type s'installe à sa console, mais l'ambiance de décolle pas, peu de gens dansent. Déception. Donc après avoir attendu quelques temps, vers 2h du matin, on se casse, dépités, avec les jambes en compote suite à la longue marche de la journée et au fait d'avoir été debout comme des cons. On essaie de rattraper un peu de sommeil en se couchant "tôt".

Lever à re-9h. Je ne me sens pas très bien. Mal aux boyaux. Nous repartons en ville pour finir la liste des endroits à visiter. Laila ne peut pas nous rejoindre avant l'après-midi pour cause de réunion familiale, elle m'enverra un texto dès qu'elle pourra. Péripatéticienne de déjection, comme dirait Bernard Pivot. Bon ben on marche alors. Visite du Kastellet (ça ne veut pas dire "petit Kastel", mais "citadelle"), une citadelle donc en forme d'étoile de ninja à cinq branche. Un chemin de terre surélevé fait le tour de cette petite île (oui, c'est également une île). On peut apercevoir au loin les cheminées des usines, de grandes éoliennes, les docks, le centre ville. Ç'aurait pu être mieux avec un temps plus sec, mais bon. On continue au Nord pour rejoindre une petite crique et non loin de là, le monument principal de Copenhague, voire le symbole, la statue de la petite sirène (en fait, c'est un type qui commanda cette statue parce qu'il fut fasciné par le ballet basé sur le conte d'Andersen). Elle ne paye pas de mine... On traverse la ville pour visiter le dernier jardin de notre épopée qui abrite le musée d'art national danois.

Nous faisons une pause dans un café histoire de nous réchauffer car mon état de santé n'est pas au beau fixe. Je me suis précipité sur toutes les toilettes que j'ai pu trouver en chemin et j'ai été frigorifié toute notre marche. Effectivement, pas au beau fixe du tout car peu après l'arrivée de nos chocolats chauds, je me précipite dans les W.C. pour vomir tout ce que je peux. C'est ballot, la bidoche hier soir au restau était pourtant bonne. Nous retournons à l'hôtel pour notre petite sieste crapuleuse. Je me couche fébrile. Vers 16h, Mad reçoit un coup de fil de sa chère et tendre et va la rejoindre. J'attends toujours que la mienne donne des nouvelles. Une grosse heure plus tard, il me rappelle comme quoi elle ne pouvait pas rester le soir car elle devait prendre un train pour retrouver sa famille qu'elle a pas vu depuis longtemps, etc. Bref, le v'là tout seul. Je lui dis que je le rejoindrai vers 19h le temps de me reposer encore un peu. J'essaie de me soigner à grands coups de verres d'eau, mais j'ai de la fièvre et un mal de crâne lancinant. Je me sens un peu mieux en début de soirée, mais je ne suis pas resté longtemps dans la capitale car fatigué et affreusement fébrile. Retour à l'hôtel donc, où je délire un peu dans mon demi-sommeil, luttant contre la chaleur ardente de ma couverture et le froid glacial de la chambre. Je reçois un SMS vers 21h30 comme quoi "Ça risque d'être difficile de se voir ce soir. Tu repars quand?". Putain, elle aurait pas pu donner de nouvelles plus tôt? D'la merde, je lui répondrai en France. Nuit agitée, coupée d'autant de verres d'eau que j'ai eu le courage de me verser et de la rentrée de Mad, qui était resté au Rock pour le concert d'une célébrité dans le milieu de la musique métallique.

Lever à 5h couvert de sueur, mais plus en forme que la veille. Avec toujours quelques soucis gastriques cependant. Petit déjeuner, rassemblage d'affaires, métro, aéroport, embarquement, vol somnolifère, RER B, mendiants, un p'tit tour chez moi pour me changer et la journée de boulot commence, à 11h30. Activité nulle, j'ai lu de la BD en ligne toute l'après-midi.

Et aujourd'hui, ma collègue de bureau est encore plus hideuse que d'habitude, avec une coiffure hirsute, des collants couleur chair-orange-malade avec des fleurs bleues et toujours une moitié de cerveau dans la nature. ARGH! Pays de merde finalement.

J'ai reçu un message de Laila hier. "Je suis vraiment désolé qu'on n'ait pas pu se voir hier. Peut-être aujourd'hui?". Je vais essayer de rester en contact avec elle, le temps que je reprenne un billet d'avion pour Copenhague...