Comme promis il y a longtemps, voici le récit détaillé de notre déménagement à Lucile et à moi.
Lundi, 7h30, chez mes parents. Réveil matinal et difficile après une nuit agitée à penser au déménagement, comme à l'époque désormais lointaine et révolue où, gamin, je me tournais et retournais dans mon lit avant le départ des grandes vacances. Un peu fatigué, la grasse matinée de la veille ayant péniblement rattrapé les efforts fournis pour l'encartonnage de mon studio parisien, mais en forme tout de même, ma motivation faisant office de réserve d'énergie. Petit déjeuner, dernier tour de vérification, derniers bisous à une mère inconsolable de voir son petit dernier partir "loin" et, à 8h, c'est parti avec mon pater. Direction : l'antre de Gérard.
Gérard est un grand ami et ancien collègue de mon papa avec qui je m'entends plus que bien et qui s'est porté volontaire pour aller me donner un coup de main dans mon périple (ce qui aurait été très sot de refuser). Nous arrivons chez lui vers 8h30, le temps de dire bonjour et prendre un kawa, nous sommes repartis pour le Super U de Brie-Comte-Robert, où les locations d'utilitaires sont les moins chères eut égard à notre parcours. Quelques formalités administratives plus tard et vers 9h15, je prends le volant du 15m³ accompagné de Gérard tandis que mon père roule tout seul dans sa Picasso. Le bolide se conduit comme un charme. Première grosse étape du voyage : chez wam.
Route vers Paris peu bouchonnée à mon grand soulagement. Oui, car j'ai oublié de préciser que l'état des lieux de sortie va s'effectuer à midi pétante ce jour même (pas le choix, avec l'agenda compressé que j'avais). Nous disposons de deux petites heures pour transbahuter tout mon barda du cinquième étage de feu 16, rue Guyton de Morveau, 75013 Paris à la camionnette de location située quelques mètres plus bas. Ce que nous, mon père et moi, tandis que Gérard s'affaire à entasser et caler les cartons et meubles.
L'opération se déroule fort bien. Un peu stressé par l'état des lieux proche, lequel nécessite que l'appart' soit vide et propre, je me hâte de sortir dans le couloir les quelques affaires non encartonnées pour raisons diverses et de passer un coup de balai et de serpillière. C'est à ce moment qu'apparaît la dame de l'agence immobilière. Bon, tant pis, elle fait sa visite tandis que je manie mon balai-brosse. La propriétaire étant en train de cuisiner son extrait de naissance avant de l'avaler (à l'instar d'une voisine de palier, pour laquelle une autre voisine, plus jeune, nous a poliment demandé de tenter de faire moins de bruit), je me retrouve donc seul à seul avec la vieille peau qui minaude comme quoi c'est pas tout à fait propre, mais pas suffisamment pour m'amputer de ma caution. Chouette, toujours ça de pris.
Juste avant de partir, je croise ma remplaçante des lieux, une femme dans la trentaine qui m'avait paru sympathique lors de sa visite quelques jours auparavent. Après avoir échangé quelques mots sur l'appartement, je reprends les commandes du camion avec Gérard tandis que mon père se rend à Place d'Italie pour récupérer une jeune demoiselle qui s'était proposée pour du covoiturage. Le 15m³ est à moitié plein, ce qui n'est pas forcément un signe d'optimisme pour l'avenir, car Lucile, si elle n'a pas beaucoup de meubles, a accumulé chez elle au fils des ans un vrai bric-à-brac. Enfin nous verrons. Il est 13h quasi-tapantes.
Voyage sans histoire. Arrivées 15h, je passe le volant à Gérard pour me reposer et somnole quelques dizaines de minutes. Dans les environs de Besançon, vers 17h, je le guide jusqu'à l'appartement de Lucile, devant lequel il se gare complètement à l'arrache (ce dont je ne lui tiens pas rigueur, car difficile de faire autrement étant donné qu'il s'agit d'une avenue assez passante). Je monte chez ma chère et tendre, croise dans l'escalier un ami à elle qui vient donner un coup de main, et la trouve au milieu d'un océan de cartons divers et variés, en train de donner des ordres à un autre pote. Un petit bécot de bonjour parce qu'il n'y a pas que ça à faire, et nous voici en train de descendre ses affaires. Mon père est arrivé entre-temps après avoir déposé son colis de 21 ans. Des paires de bras viennent prêter main forte au fur et à mesure, ce qui accélère grandement la cadence. Gérard est en train de ressentir ce que ressent un joueur de Tetris quand il ne lui reste plus que 5 lignes pour manoeuvrer avant le Game Over de trop plein. Le camion se remplit dangereusement et les cartons ne cessent d'affluer. Certes, il reste encore la voiture de mon père que nous avions réservée pour les colis fragiles, mais le volume est relativement faible. Sueurs froides à l'idée d'obliger Lucile à abandonner de ses affaires. D'autant plus que j'avais oublié de passer par chez un ami à elle pour récupérer un meuble TV et une table basse. Argh !
Il est 20h. Les derniers cartons en retard se remplissent pendant que ceux préparés en avance descendent les escaliers. Le studio se vide de plus en plus, les dernières babioles disparaissent de nos vues et c'est avec un grand soupir de satisfaction que je vois que Gérard géra. Tout tient, il reste même un peu de place pour les meubles à récupérer. Mais la pause s'impose, et après avoir dit au revoir aux déménageurs d'un soir qui ne pouvaient rester, je vais commander les pizzas pour ceux qui restent. Nous mangeons et buvons nos bières dans l'appartement vide de Lucile. C'est un spectacle assez effarant pour celui qui a vu ce même lieu regorger de moult possessions accumulées au fil des ans. Le ménage reste à faire, mais nous avons tous eu assez de boulot pour aujourd'hui, d'autant plus que la nuit tombe.
Après voir tous mangé et bu nos parts, vers 21h, nous repartons pour la grande maison quelque peu isolée des amis de Lucile où sont stockés les meubles restants. Nous les chargeons à la lueur des phares (il reste heureusement suffisamment de place) et laissons dormir le camion dans le terrain qui entoure la baraque (c'est le parking le plus sûr que nous avons pu trouver pour le chargement). Nous reprenons ensuite la voiture à quatre pour nous diriger chez les parents de l'ex de Lucile, avec lesquels elle entretient toujours d'amicaux rapports, afin de passer le nuit (eux aussi ont une grande maison, pleine de chambres).
Chaleureux accueil des dits parents, que j'avais rencontrés à une précédente occasion pour une fondue. Ils nous servent un bon gâteau à la meringue et au citron avec café. La journée fut épuisante, et, maintenant qu'il est plus de 22h, je suis las las las. Le fauteuil dans lequel je suis assis est une bénédiction, le gâteau et le café aussi, mais j'attends la douche avec une impatience de gamin la veille de Noël. Après avoir causé avec l'ex-belle-famille de ma chérie, nous montons dans les chambres d'amis et chacun son tour, nous prenons nos douches (afin de gagner du temps, nous la prenons ensemble Lucile et moi, alors qu'il ne reste plus beaucoup d'eau chaude). Se mettre sous les draps finit de m'emmener au Nirvana et, maintenant que nous avons recouvré notre intimité Lucile et moi, nous nous disons plus amplement bonjour.
Réveil le lendemain vers 7h30 derechef afin de prendre un bon petit déj. Après avoir salué les parents de l'ex, nous nous éclipsons pour récupérer le camion qui avait également passé une bonne nuit. Direction l'appartement de Lucile et nous la laissons poursuivre son ménage pendant que Gérard, mon père et moi faisons quelques emplettes de provisions franc-comtoises pour la route. Le ménage terminé, vers 9h30, nous devons encore faire un crochet par la DDE afin de rendre les panneaux que Lucile avaient empruntés pour l'occasion et qui n'ont finalement pas servi à grand chose (nous avions réussi à nous garer sans gêner personne). Nous poireautons une bonne poignée de minutes avant qu'un employé daigne nous rendre le chèque de caution et nous voilà repartis pour de bon, vers le Sud, vers 10h15. Les amoureux dans le camion, les anciens cheminots dans la voiture.
Voyage sans histoire, un peu longuet (forcément). Les conducteurs des véhicules changent toutes les 3h, et je roupille pendant la traversée du Massif Central parce que bon, à la longue, ça commence à faire pas mal. Nous arrivons après la nuit, vers 20h, devant notre chez nous. Jean-Phi, un ami de Lucile qui nous a obligeamment rendu le service d'aller chercher les clefs de l'appartement à l'agence avant que nous n'arrivions, se pointe un quart d'heure plus tard, ce qui nous a permis de garer le camion comme il faut sans trop gêner la circulation dans la résidence et de préparer le déchargement. Avant que celui-ci ne commence, nous faisons un tour à vide dans notre nouveau chez nous.
Alors déjà, l'entrée de la résidence comprend un portail qui s'ouvre par télécommande. Une fois à l'intérieur, il y a notre bâtiment directement sur la gauche et plus loin, d'autres se profilent, avec également des places de parking qui les longent. Premier hic, l'entrée de notre bâtiment se situe à l'arrière de celui-ci, c'est-à-dire qu'il y a un petit chemin qui part de la route principale et qui contourne la bâtisse, ce qui va nous faire pas mal de trajet avec tout le chargement. Digicode, puis hall d'entrée très propre, très bien. Double portes vitrées et nous voici dans le couloir, qui part à droite et à gauche vers d'autres appartements. Le nôtre est au premier étage (sans ascenseur). Les escaliers et le couloir du premier sont couverts de tapis rouge, et les lumières sont contrôlées par détecteurs de mouvements. Les murs sont couverts de papiers peints jaunes, et l'ambiance fait penser à un hôtel. Tout est calme, propre, molletonné. Nous ouvrons notre porte et sommes bien contents de ce que nous découvrons.
Entrée avec penderie sur la gauche, salon et cuisine américaine également à gauche, avec un balcon au dehors, deux chambres et salles d'eau le long d'un petit couloir à droite. Les murs sont blancs, et tout est carrelé de grandes dalles blanc-cassé. Ça a l'air propre aux premiers abords, c'est spacieux, moderne, bien équipé (4 plaques vitro, hotte, frigo, baignoire...). Lucile jubile intérieurement (il y a du monde), et je suis bien ravi également. Mais il n'y a pas que ça à faire. Nous établissons une chaîne : Gérard dans le camion (il y oeuvre si bien), mon père avec le diable transbahute les cartons du camion au hall, je me charge de les monter au premier et Lucile les réceptionne pour les amener et les ranger dans l'appartement. Jean-Phi ayant d'autres obligations, nous ne sommes que quatre pour tout décharger. Bientôt cinq car un autre ami de Lucile nous rejoint au bout de deux heures d'effort. L'opération se déroule bien, nous suons à grosses gouttes, les muscles bandent, la poussière s'envole et au bout du compte, tout tient dans notre chez nous.
Nous récupérons quelques bières de la veille ainsi que les restants de pizza pour faire notre repas. C'est le capharnaüm complet, mais au moins, c'est fini. Pour nous en tout cas, car mon père et Gérard ramènent le camion et la voiture sur la région parisienne, ce qui leur fait encore un bon trajet devant eux. Le temps de trouver de quoi doucher et coucher tout le monde, et c'est la roupillade générale, vers 23h-00h.
Mercredi, réveil vers 8h car il faut rendre les clefs du camion ce soir et la route n'est pas courte. Je prends le petit déj. avec mon père et Gérard (mon père est grognon car mal dormi sur le matelas pneumatique). Pas de grand préparatif, ils partent donc vers 8h30. J'avoue m'inquiéter un peu sur l'état de forme des deux conducteurs, mais bon, je n'y peux pas grand chose. Alors que j'étais plein de bonne volonté pour commencer le rangement, Lucile, grognonne aussi car pas du matin, m'invite à retourner me coucher avec elle. Ce que je, et m'endors finalement pour me réveiller vers 12h (j'avais besoin de repos). Lucile avait conservé quelques victuailles de dernier recours, et c'est d'elles que nous composons notre premier déjeuner dans notre nouveau chez nous.
L'amoncellement de cartons et de morceaux de meubles épars est assez décourageant. Le volume d'affaires à trier ferait se décourager un puceau devant une paire de séduisantes guibolles écartées, mais la récompense au bout de notre peine vaut clairement le coup de l'effort. D'ailleurs, pour commencer, je monte le lit, afin d'avoir des nuits confortables et reposantes. Une fois le bricolage effectué et le matelas bien en place sur le sommier, nous partons explorer le coin.
Notre résidence est plutôt calme, malgré l'autoroute située à un gros jet de pierre de notre balcon. Avec un peu d'effort cependant, on peut croire qu'il s'agit du roulis des vagues de l'Atlantique. Nous nous dirigeons vers l'avenue principale d'Aucamville, qui n'a d'avenue que le nom et éventuellement sa longueur, et nous découvrons avec allégresse toutes les échoppes nécessaires à la survie dans notre société : boulangerie, médecin, pharmacie, bureau de poste, un Picard... Nous poussons même le vice à repérer un primeur et les agences de nos banques respectives. Tout est à un petite dizaine de minutes de marche, c'est assez rassurant. Sur le chemin du retour, nous explorons dans plus de détails le mini-centre commercial (on peut même dire micro) où se sont établis restaurants, lavomatic, centre de relaxation et club de sport. Ce dernier élément me titille car pour le coup, un lieu de sport à 5 minutes à pied, c'est très alléchant.
Les jours qui suivent se ressemblent assez. Déballages, rangement, aller-retours sans fin dans les magasins environnants (Ikéa, Alinéa, Castorama, Conforama, Géant Casina...) afin de remplir la demeure de biens périssables et d'autres mobiliers. Le budget en a pris un sacré coup dans l'aile, mais l'avantage d'avoir choisi la stratégie du "tout d'un coup", c'est qu'à l'heure actuelle, nous sommes bien installés avec tous les besoins primaires, secondaires ainsi que tous les autres satisfaits.
Voilà. Je suis conscient que la fin est moins détaillée que le début, mais les souvenirs s'estompent vite et l'installation a été moins épique que le déménagement.